Marrakech – « Contraintes et perspectives de financement des PME » a été le thème central de la 2ème édition du Forum régional de la PME Marrakech-Safi organisée, jeudi dans la cité ocre, à l’initiative de la Chambre de Commerce, d’Industrie et de Services (CCIS) de la région.
Cette rencontre d’envergure, initiée en collaboration avec des opérateurs économiques représentant différents secteurs, des établissements bancaires et des enseignants et chercheurs universitaires, s’inscrit dans le cadre de la stratégie de la Chambre visant à accompagner les PME et à les aider à contribuer, avec efficacité, à l’accélération du développement économique aux niveaux régional et national.
Ce conclave socio-économique se veut aussi un espace privilégié pour débattre du financement de cette catégorie d’entreprises et des différents mécanismes relatifs à l’appui et à l’accompagnement des initiatives entrepreneuriales.
Ainsi, cet événement ambitionnait d’informer sur toutes les composantes du système financier dans ses volets législatif et juridique au Royaume, dédiées aux Très Petites et Moyennes Entreprises (TPME), ainsi que sur les difficultés qui entravent leur expansion.
S’exprimant à cette occasion, le président de la CCIS de Marrakech-Safi, Mohamed Fadlam, a indiqué que la Chambre a veillé, depuis sa création, à accompagner les TPE-PME et à interagir avec elles avec efficience pour assurer leur développement et le renforcement de leurs capacités au service de l’économie régionale et nationale, mettant en relief les Hautes Orientations Royales contenues dans le Discours prononcé par SM le Roi Mohammed VI devant le Parlement à l’occasion de l’ouverture de la session d’automne, et dans lequel le Souverain avait exhorté le secteur bancaire national à un engagement plus ferme et à une implication positive plus vigoureuse dans la dynamique de développement que connaît le pays, notamment le financement de l’investissement, l’appui aux activités productives, pourvoyeuses d’emplois et génératrices de revenus.
Dans ce sens, M. Fadlam a souligné qu’outre l’engagement du secteur bancaire auprès des grandes entreprises en termes d’appui et de financement, il doit aussi, comme l’a réaffirmé le Souverain, s’acquitter de la mission prépondérante qui lui échoit en matière de développement, en veillant à simplifier et à faciliter les procédures d’accès au crédit, à s’ouvrir davantage aux auto-entrepreneurs et à financer les petites et moyennes entreprises. Le financement de ces entités constitue un pilier essentiel pour assurer le développement et la croissance économiques et réaliser la stabilité sociale et politique, a dit M. Fadlam.
Rappelant que les TPE-PME jouent « un rôle majeur et vital » dans la croissance économique, la création d’emplois et le renforcement de la cohésion sociale à même de s’ériger en « une épine dorsale » de toutes les économies modernes, il a précisé que cette catégorie d’entreprises est confrontée à plusieurs difficultés et contraintes liées essentiellement à l’accès au financement bancaire.
Face à ces obstacles et entraves, les chefs des TPE-PME ne doivent pas baisser les bras, a-t-il martelé, relevant l’existence d’une multitude de mécanismes dont les propriétaires de ces entreprises peuvent bénéficier pour tirer vers le haut le niveau de compétitivité de leurs unités de production, dont les mécanismes de financement conjoint ente l’Etat et les banques en faveur de certains secteurs, gérés par la Caisse Centrale de Garantie, ou ceux mis en place par Bank Al-Maghrib et destinés à cette catégorie d’entreprises.
Et M. Fadlam d’insister que les banques doivent être en phase avec les visions sages de SM le Roi en tant que secteur citoyen et ce, en accordant la priorité aux garanties relatives au projet financé, en veillant à la célérité de leur examen, et en établissant une relation « win-win » avec leurs clients, le tout conformément au plan tracé par le Souverain et s’articulant autour de plusieurs axes qui visent à favoriser l’accès, aux crédits bancaires, du plus grand nombre de jeunes qualifiés, porteurs de projets et issus des différentes catégories sociales, à soutenir les PME spécialisées dans les activités d’exportation, notamment vers l’Afrique, et leur permettre de capter une partie de la valeur ajoutée générée au profit de l’économie nationale, et à faciliter l’accès aux prestations bancaires et aux opportunités d’insertion professionnelle et économique, à l’ensemble des citoyens, en général et aux travailleurs du secteur informel, en particulier.
De son côté, le président régional de la CGEM-Marrakech-Safi, Youssef Mouhyi, a souligné que les PME et les TPE représentent « la colonne vertébrale de l’économie nationale et régionale », ajoutant que les PME représentent l’essentiel du tissu entrepreneurial, soit une proportion dépassant les 95%, sachant qu’elles jouent un rôle primordial dans le développement économique et territorial ainsi que dans la promotion de la dimension sociale, à travers la création de la majeure partie des emplois.
Il a fait remarquer que conscient du fait que la compétitivité de l’économie marocaine dépend de la solidité et de la performance de la TPE-PME, la CGEM a attribué « une place de choix » à cette catégorie d’entreprises et leur apporte un soutien volontariste à travers de multiples mécanismes.
Le premier mécanisme est celui des Commissions transverses, puisque plusieurs Commissions de l’Organisation patronale traitent des thématiques comme la formation, la fiscalité et le financement, qui intéressent les TPE-PME, alors que le 2ème mécanisme porte sur l’action législative du groupe parlementaire de la CGEM au profit de cette frange d’entreprises, a-t-il poursuivi, notant que ledit groupe focalise son action et tous ses efforts sur la défense de l’intérêt de l’entreprise en général, et de la TPE-PME en particulier.
M. Mouhyi a précisé que l’engagement de la CGEM se fait également d’une manière continue sur des axes prioritaires bien identifiés comme le renforcement de l’industrie marocaine et de la compétitivité de l’offre Maroc, le développement du capital humain, l’accès au financement et au marché public, l’amélioration de l’environnement de l’entreprise et la modernisation accélérée des PME via la digitalisation, ajoutant qu’au niveau régional, la Confédération travaille d’arrache-pied pour l’émergence de nouvelles TPE-PME et startups innovantes, avec comme seule ambition leur permettre une montée en croissance, augmenter leur compétitivité et saisir les opportunités de développement sur les marchés nationaux et internationaux.
Il s’est, en outre, félicité du démarrage des Centres Régionaux d’Investissement (CRI) dans leur nouvelle formule, concluant qu’avec leur nouvelle organisation et leurs nouvelles missions, dont l’accompagnement des entreprises notamment dans la recherche de foncier et de financements, les CRI vont jouer un « rôle primordial » dans le développement, l’incitation, la promotion et l’attraction des investissements à l’échelon régional.
Pour sa part, le vice-président du conseil régional de Marrakech-Safi, Thami Mouhib, a mis en exergue le choix judicieux de la thématique de ce Forum, soulignant l’apport des PME en tant que moteur du développement socio-économique ainsi que leur rôle crucial dans la création de la richesse et des opportunités d’emplois.
Après avoir noté que l’organisation de cette rencontre coïncide avec deux événements importants et stratégiques à l’échelle nationale, à savoir la désignation par SM le Roi Mohammed VI des membres de la Commission chargée du nouveau modèle de développement et l’organisation, les 20 et 21 décembre à Agadir, du premier colloque national de la régionalisation avancée, M. Mouhib a indiqué que les collectivités territoriales, avec à leur tête les régions, sont appelées à répondre aux attentes inhérentes à la gouvernance territoriale.
Il a, dans ce sillage, rappelé que le programme régional de développement ambitionne de relever trois défis essentiels relatifs à l’emploi, à la durabilité et à l’intégration sociale, tout en se penchant sur d’autres domaines d’intervention, dont l’attractivité, la compétitivité territoriale, le développement économique et social, l’efficacité énergétique, la valorisation du patrimoine environnemental et immatériel, et la consécration de l’identité de la région en tant que pôle économique.
Conformément aux orientations stratégiques de ce programme, la région de Marrakech-Safi assume pleinement son rôle en tant qu’acteur soutenant et accompagnant les écosystèmes des partenaires générateurs de la richesse et de l’emploi, et qui visent à créer une dynamique entrepreneuriale en phase avec les potentialités de la région, à travers des programmes de création et de promotion des PME, des coopératives et des activités génératrices de revenus dans les différentes provinces de la région, a-t-il poursuivi.
Il a émis l’espoir de voir ce Forum marquer le lancement du processus d’élaboration d’un « Livre blanc » sur les PME au niveau de la région Marrakech-Safi, souhaitant que ce document serve de « feuille de route » pour l’accompagnement du secteur informel, en tant que pépinière des porteurs de projets, en vue de faciliter son intégration dans le tissu économique régional.
Quant au président du comité d’organisation du Forum et de la commission des Affaires économiques et sociales à la CCIS de Marrakech-Safi, M. Abdelmoula Ballouty, il a souligné l’importance de l’organisation d’un tel événement qui sert d’espace idoine pour débattre d’une question importante et d’actualité, mettant l’accent sur l’impératif de garantir le soutien financier et l’accompagnement des TPE et PME.
Il s’est, par ailleurs, félicité de la présence d’un parterre d’enseignants, d’experts et de responsables d’établissements bancaires pour enrichir les débats et densifier les discussions tout au long de cette rencontre, dont la 1ère édition a connu un large succès, tout en mettant en avant la pertinence des thèmes qui seront débattus lors de ce 2ème Forum.
Ce Conclave a été ponctué d’un exposé exhaustif de l’invité d’honneur de cette 2ème édition, M. Mohamed Berrada, professeur universitaire et ancien ministre des finances, qui a axé sur son intervention sur le rôle de la PME dans le futur modèle de développement économique du Maroc.
M. Berrada a ainsi mis l’accent sur la situation financière des PME nationales, leur rôle indiscutable dans le développement socio-économique et en tant que source d’innovations, de création d’emplois et de richesses, qui est essentielle pour favoriser la dynamique économique, sociale et territoriale.
Cependant, a-t-il noté, elles font face à des difficultés rédhibitoires internes et externes, à même d’être contraintes d’assurer leur survie au lieu de se consacrer à l’innovation. Ces difficultés, dont celles liées à l’accès au financement, incitent tous les intervenants à établir des diagnostics objectifs et à proposer des solutions adéquates qui permettent à ces entreprises de jouer pleinement leur rôle de locomotive de l’économie nationale, a-t-il expliqué.
M. Berrada a précisé que même si les pouvoirs publics sont conscients de l’importance des PME et ont mis en place plusieurs dispositifs et mécanismes pour les accompagner, l’accès de ces entités aux services financiers reste encore faible, ce qui s’est traduit par « une aggravation des inégalités » entre les grandes entreprises qui peuvent recourir aux marchés des capitaux, et les PME qui n’y ont pas accès.
Rappelant que plusieurs crises économiques, sociales, environnementales et géopolitiques se combinent aujourd’hui avec le chômage des jeunes, les inégalités sociales et la robotisation, il a estimé que le mode néolibéral montre des « signes d’essoufflement ». Dans ce sens, il a souligné que le Royaume ne peut pas rester à l’écart de ces mutations actuelles et c’est dans ce contexte qu’ »il faut réfléchir sur l’avenir de notre économie et des PME nationales ».
Il a aussi soutenu que tout modèle de développement à concevoir doit donner la priorité à la production nationale pour créer du revenu et accroître la consommation et les investissements, indiquant que les investissements productifs créateurs d’emplois permanents n’ont pas été à la hauteur des ambitions du Royaume, surtout que ce sont les PME qui les créent.
M. Berrada a, en outre, insisté sur la nécessaire « consistance humaine » dans toute stratégie de développement à concevoir: un modèle où les principes d’économie sociale et solidaire dominent, un modèle à visage humain où l’Homme doit être au centre du développement, tout en appelant à renforcer la cohésion sociale et l’intégration de la jeunesse, et à consolider les liens de solidarité entre les différents secteurs de l’activité économique au lieu de ces dichotomies qui les caractérisent.
Au cours de ce Forum, plusieurs thèmes ont été discutés portant sur « l’analyse du cadre législatif et légal des opérations de financement de la PME », « le financement bancaire des TPME au Maroc à l’épreuve des faits », « l’intermédiation financière inclusive », « le rôle de la Caisse Centrale de Garantie dans l’accompagnement des TPME », « le dispositif de financement et d’accompagnement des TPME par Attijari Wafabank », « les solutions de la Banque Populaire pour l’accompagnement et le financement des TPE » et sur « les programmes d’appui au profit des TPME ».